Desserrer la vis
Dix-neuf jours. C'est long, et c'est court à la fois : comprenez que le temps est passé vite, et en même temps chaque jour en valait dix. Et si j'ai tant tardé à venir vous présenter mes meilleurs vœux pour cette nouvelle rotation de la Terre autour d'elle-même, faite de joies, d'amour, d'enseignements et du meilleur possible, c'est parce que je n'avais pas trouvé encore sous quel signe je voulais placer 2022.
Puis, j'ai vécu ces jours, prudemment, parce que chacun d'eux apportait un bienfait ou un méfait, comme si mes antennes étaient sorties et que je m'en apercevais, en conscience, alors que ça arrive tous les jours, on est bien d'accord. Et j'ai compris ce que je nous souhaitais : de desserrer la vis, de nous délester des contraintes variées qui nous pèsent, de ces croyances qui nous ont sans doute aidés jusqu'aujourd'hui, mais qui, à présent, sont obsolètes. Et en voici quelques réflexions...
Cela concerne tous les domaines, bien sûr, j'espère que bientôt, le climat ambiant s'apaisera et qu'à tout point de vue, nous connaîtrons une trêve, pourrons de nouveau tomber nos masques de papier, mais aussi nous pourrons comprendre les raisons de cette pandémie : tout est lié, tout est interdépendant, de nos comportements, du tourisme de masse, de notre consommation abusive en tout genre, de la fast fashion, de la pollution et donc, de mélanges des genres qui causent ce genre de situation : il y en aura encore, même si nous nous mettons en marche pour "réparer" la planète, la nature, que nous (les hommes) avons tant amochée. Ne nous leurrons pas, il n'y a pas de complot mondial qui crée une pandémie, c'est pas un truc secret, c'est visible comme le nez au milieu de la figure, mais on cherche toujours des coupables ailleurs : c'est notre comportement humain qui crée la pollution des déserts, le forage des fonds marins, la pollution des océans, l'extinction des espèces animales, qui pousse les espèces sauvages, faute d'abri naturel, à se rapprocher des villes et à mélanger leurs bactéries (naturelles) aux nôtres. Alors vous êtes en train de vous demander, pourquoi je vous sape le moral ? En fait, mes chers joyeux, je ne sape rien, c'est même tout le contraire ! On sait ce qu'il faut faire pour éviter de retomber si bas, alors, faisons-le, sans nous cacher derrière des théories fumantes. Être adulte, c'est être conscient et agir en conscience. Réduire sa consommation, à tout point de vue, en vêtements, en nourriture, en objets, en carburant, c'est être conscient, c'est être positif, c'est croire en l'avenir, c'est vouloir que cet avenir ait lieu. Et quand on voit comment les hommes se comportent, comment des gens réussissent à être encore plus milliardaires qu'ils ne l'étaient dans un contexte où d'autres s'épuisent au travail, pour sauver des vies et où d'autres attendent des vaccins pour ne pas sombrer, on se demande ce qui ne tourne pas rond. Alors oui, en premier lieu, j'espère qu'on cessera de se diviser pour des peccadilles et qu'on trouvera la force de faire tomber nos ego pour s'unir sur les causes urgentes, importantes : quand la banquise aura fondu, on ne pourra pas incriminer les migrants et l'absence de sécurité. Recentrons le débat, vite : soyons humains, mieux encore, soyons Terriens.
Cela concerne aussi le domaine du travail : depuis longtemps, on a tendance à valoriser ceux qui se lèvent tôt le matin pour aller travailler, parce que le travail est synonyme de dureté, de labeur, de difficulté, de "gagner son pain à la sueur de son front" : STOP IT NOW ! Le travail peut aussi être un plaisir, peut aussi enrichir à titre personnel, philosophique, intellectuel, on n'est pas obligé de trimer, on n'est pas obligé de s'énerver, de détester son patron, on peut aimer son travail et le faire à son rythme. Conclusion d'une longue bataille contre moi-même, qui, étant mon propre "patron", me faisais violence pour être prête à travailler dès 8h du matin. Je me réveille facilement à 6h, mais la mise en route est difficile, et je sais très bien pourquoi, j'ai beau avoir 8h de sommeil au compteur et avoir très bien dormi, il m'est impossible de me lever dès la première sonnerie du réveil. Alors je tarde, je souffle, je galère, parce que ce n'est pas naturel. J'ai donc décidé de me calmer. Qui m'attend, chaque jour, au bureau ? Personne : c'est une question d'organisation, à mon rythme. Bien sûr, si j'ai un rendez-vous, tôt le matin, qui ne peut être déplacé (comme une conférence de presse) je sais le faire, me lever me préparer et arriver. Mais j'ai tiré sur la corde trop longtemps.
L'hypothyroïdie présente certains désagréments, comme la fatigue au réveil qui s'estompe peu à peu dans la matinée. Je suis véritablement opérationnelle à partir de 9h30, totalement efficace de 10h à 18h, même parfois, très efficace le soir, tard. Mais ça ne colle pas avec le reste du monde et mes activités professionnelles commandent d'être au moins synchro une grosse partie de la journée.
Dès décembre j'ai commencé à y réfléchir, en janvier, j'ai essayé de m'organiser, désormais, j'ai compris, qu'avoir travaillé 70h par semaine ces dix dernières années m'avait consumée. C'est impossible pour moi d'en faire autant que j'en faisais précédemment. Physiquement, je ne peux plus faire ça, bosser sans pause, sans relâche, sans interruption, avec peu de sommeil, sans manger à ma faim et en me jetant sur la première connerie sucrée venue. Alors j'ai respiré un coup : il est temps de se respecter.
Prendre le train, pour venir travailler, c'est déjà un bon début, au moins trois fois par semaine, mais sans contrainte : le train de 9h03 ou maxi de 9h26 me fait arriver au bureau avant 10h, c'est très bien et ça m'encourage à marcher, donc à bouger. Parfois, en cas de rendez-vous dans la journée qui risque de se terminer plus tard, ou bien de rendez-vous plus lointain, prendre la voiture, certes, mais cela n'est pas la règle absolue (et mon bilan carbone s'allège en même temps que mon poids, youhou)
Faire des horaires normaux, enfin, acceptables par mon corps et mon esprit : le démarrage est lent, on ne va pas s'énerver. Si je démarre entre 9h30 et 10h, et que je termine à 18h, avec une heure de pause le midi, c'est 7h de travail et c'est "normal". Avec une journée de télétravail par semaine, le mercredi, pour faire une pause encore mieux. En gros, c'est à la carte que j'ai bâti ce programme, parce que c'était très éparpillé, plein de contraintes, plein de galères, de grincements de dents et à la fin : de déception. Parce que j'ai sans doute une "Madame Parfaite" très active dans un coin de ma tête qui voulait me conformer au monde extérieur. No way : apprendre à dire non, et le faire, c'est nouveau, c'est cool, c'est ok. Et puis, j'ai décidé d'arrêter de forcer les choses, si ça ne veut pas, si mon cerveau n'accepte pas la tâche que je lui propose, je vais faire un tour, à mon retour ça va mieux et il est de nouveau disposé à coopérer. Une tête trop pleine c'est la cata assurée : desserrer donc. Ce n'est pas parce que je me force à me lever à 6h, pour être au boulot à 7h pour montrer au mooooooooooonde comme je suis courageuse et comme je suis bosseuse et blabli blabla j'ai rien à prouver à personne, et ça ne fait pas de moi une feignasse de bosser 7h par jour. Et être au bureau à 7h, oui, ça pourrait me faire gagner du temps, en théorie, mais en pratique, franchement on sait parfaitement qu'on est connecté aux réseaux sociaux toute la journée, et qu'on y passe un temps infini. Arrêtons de nous raconter des histoires : ce n'est pas le temps de présence qui compte mais le temps de travail effectif. Si je suis efficace durant un temps, même court, j'aurais tout gagné. Répéter les vieux schémas, bouffer son pain noir, trimer, en chier, c'est bon, j'ai déjà fait. Je bosse depuis 1999, autant vous dire que j'ai pas créé deux activités qui me ressemblent pour vivre la vie de Tartempion. Et je suis bien persuadée que vous pouvez arriver à ce genre de conclusion, mais vous n'êtes obligé à rien du tout. Voili voilou
Cela concerne bien entendu l'alimentation, le bien-être, la joie en général: je tournais en rond, sans savoir comment me nourrir avec ces foutues allergies apparues il y a déjà 9 ans (wooooow) et j'ai découvert par hasard une appli qui me prépare des menus, me file les recettes et me permet de manger tous les jours des choses nouvelles sans me ruiner (et sans m'empiffrer tant qu'à faire, juste par ennui) Oui, soyons honnêtes, j'ai pris du poids, en deux ans de pandémie, à rester souvent assise, à manger du chocolat sans bouger, forcément le résultat est bof bof. Alors il y a un facteur santé, c'est évident, les hormones, le poids qui fait yo-yo, c'est un fait. Mais il y a aussi l'absence de mouvement, et l'alimentation foutraque : quand on n'a pas les bases hein souvent... on galère.
Donc, on remet tout ça en place, déjà, disais-je, venir en train me permet de collecter des pas (j'ai un portable sur le point d'appeler les secours quasiment un jour sur deux depuis décembre, donc j'avance là, au sens propre et figuré) et bien sûr, on se calme : c'est ok, de ne pas avoir envie de sortir un soir pour se reposer, d'avoir plutôt envie de lire ou de regarder un film que d'aller boire un verre, d'être plutôt partant pour un hammam que pour un trail, chacun fait à son rythme, stop les injonctions bon sang : on se fait du bien, on se fait du bien, c'est tout. En fait, c'est là que je sens mes 40 (bientôt 41) ans, j'ai passé l'étape du no pain no gain, ça fait 40 ans que ça dure. J'ai atteint le palier suivant. Bonheur : je vais bien, et je suis décidée à faire en sorte de n'avoir mal nulle part, ni aux lombaires (donc je bouge) ni au bide (donc je mange mieux) ni aux jambes (donc je nage) ni à la tête et au cœur, donc je me fais du bien. Voilà, vous voyez, c'est ça mon stade actuel. Evidemment qu'on est responsable de son corps, de sa tête, de son bien-être, bien sûr que rester avachi sur le canap' en bouffant le Nutella à la cuillère c'est ni bon pour soi ni pour la planète et les orangs-outans (si t'as pas la réf, cherche la réf) mais il n'est plus question de souffrir, ce qui m'amène à mon dernier point.
Cela concerne bien entendu, le domaine sentimental. Très récemment, deux micro-événements ont déclenché des prises de conscience existentielles : on n'est pas obligé de chercher le grand amour, et on n'est pas obligé de dire oui si on est sollicité. Notre recherche effrénée de l'âme sœur, de "ça y est, cette fois, c'est la bonne", nous contraint tellement ! Pourquoi ne pas juste laisser les choses venir à nous, ou accueillir et jauger les situations, comme elles se présentent ? Pourquoi à tout prix vouloir faire peser sur les rencontres un impératif de réussite absolue ? Wow on se détend là aussi ! Admettons qu'on rencontre quelqu'un, qui nous plaît, qui nous fait sentir bien surtout et avant tout, quels que soient nos critères de sélection, parce que souvent genre très très souvent, ceux qui cochent toutes les cases ne sont pas si adaptés à nous qu'on l'imagine, pourquoi ne pas juste apprécier les moments passés ensemble ? Et alors le deuxième moment-clé : pourquoi ne sommes-nous jamais clairs sur nos intentions ? Enfin, et j'ai dû attendre 40 ans pour que quelqu'un me pose la question, un homme m'a demandé quelles étaient mes intentions à son égard. Si vous me suivez depuis le début, vous savez que j'ai une peur bleue du rejet et en même temps d'être un poids, ce qui me pousse - bêtement et inexorablement - à ne jamais brusquer les choses, à ne jamais poser de questions, à ne jamais demander à l'autre quelles sont ses intentions, histoire d'être fixé (et de gagner du temps, enfin surtout d'économiser en colle pour rapiécer mon cœur quoi) Noooooon, pensez-vous ! J'adore souffrir, donc ça ne m'empêche jamais de m'emballer, de rêver, de sublimer, de fantasmer, d'idéaliser, une relation que je vis dans ma tête, puisque clairement, l'autre en face s'en fout mais de OUF comme on dit, mais moi je vis vachement bien dans le déni, j'ai l'habitude, c'est un bain confortable... Bref, là quelqu'un s'est soucié de ce que j'avais envie de faire, pour lui, pour moi aussi, alors que nous n'avions échangé que des messages, sans aucune dimension de séduction : MERCI ! Oui, merci de m'avoir posé la question, de m'avoir considérée, de m'avoir demandé où j'en étais en fait, parce que c'est ça aussi : avant d'aller plus avant, comment tu vas, où tu en es, que désires-tu ? Scotchée par la question, je n'ai donc pas réfléchi et j'ai laissé parler mon cœur : je veux être bien, et je le suis enfin. Seule. J'ai atteint un stade de bien-être (pas encore total, sinon on ne désire plus rien, quand on a tout) que j'espérais ardemment depuis trois-quatre ans. Alors, je vais bien et je ne cherche rien, je ne veux pas forcément entrer dans une relation sentimentale, même si je suis célibataire depuis longtemps (au moins...9 ans) parce que j'ai passé tout ce temps à comprendre qui j'étais (et je rappelle que je reviens de très très loin les gars donc, 9 ans, c'est rien du tout à l'échelle du far west) Si les choses doivent arriver, elles arriveront, mais je ne fais rien pour qu'elles aient lieu. Et si elles arrivent, je les prendrai comme telles, pour ce qu'elles sont, sans plan sur la comète, envie d'absolu, quête du graal, j'ai mûri : ça fait bizarre de l'écrire, mais c'est un fait.
L'amour est partout autour de nous, si nous regardons bien, et surtout il est en nous, si nous sommes très objectifs. L'amour, c'est le moteur de la vie, être heureux avec soi, c'est être bien partout ou être capable de partir si ça résonne mal. L'amour, c'est être libre de ses choix, de ses opinions, sans faire de mal à personne, sans faire peser sur personne la responsabilité de nos décisions, de nos actes et de nos choix. L'amour c'est aller bien, c'est être heureux, respirer sans obstacle, sans souci. Si les liens avec les autres ne ressemblent pas à ça, c'est autre chose, parce que l'amour (et donc l'amitié) c'est fluide, simple, beau, sans contrainte, avec respect et bienveillance mais sans forcer, sinon, ce n'est pas de l'amour.
Du coup, exit la pression, j'ai fini par accepter que les gens entrent et sortent de ma vie, que certains trains passent sans que je sois montée à bord, ou que d'autres n'aient pas fait tout le trajet avec moi. Rien n'est grave. Tant qu'on est en vie. Chaque histoire est jolie et je n'ai rien à regretter de celles que j'ai vécues. Elles m'ont permis de ressentir, d'être vivante, de vibrer. Je ne ressens aucun manque à présent. La vie est douce. Et j'ai bien l'intention qu'elle le reste, y compris seule donc, vous l'aurez compris.
Alors voilà, mon souhait pour nous tous, et c'est là où je voulais en venir en vous livrant ces quelques réflexions, c'est qu'on desserre un peu la vis, pour trouver notre rythme, pour trouver ce qui nous rend la vie douce et qui nous permet d'avancer. Se connaître, s'apprécier, c'est déjà un début. C'est même la seule manière de s'ouvrir au monde, de l'accepter, de le découvrir, d'aller le voir de près, de s'y confronter parfois. Qui sommes-nous, que voulons-nous, où allons-nous, ces prochaines heures, ces prochains jours, ces prochains mois ? On a redécouvert le principe de l'instant présent, de la patience, avec les confinements, on les a rangés au placard un peu trop vite à mon goût. Ne soyons pas des copies qu'on forme, levons les injonctions, les barrières mentales imposées par des diktats sociétaux cultivons notre originalité, soyons nous, libres, joyeux, même dans la dureté, même dans l'épreuve, même dans les torrents, même si la situation n'est pas encore à l'accalmie, ça viendra, toute situation étant éphémère, cette crise sanitaire l'est aussi. Soyons là, "tout heureux d'être en vie et d'y voir clair." Je vous embrasse et vous souhaite une belle meilleure année.
Commentaires